Rallumer les étoiles

Par Dominique Paquet, autrice jeunesse, déléguée générale des Ecrivaines et Ecrivains associés du Théâtre, membre du comité du 1er juin des écritures théâtrales jeunesse

Telle est l’injonction ! Dans le Prologue des Mamelles de Tirésias (1917) de Guillaume Apollinaire, le directeur de la troupe de théâtre constate que les canons ont assassiné les constellations au-dessus des champs de bataille de la Grande Guerre. « Nous étions là mourant de la mort des étoiles (…) et que pour sauver le monde, il est grand temps de rallumer les étoiles. »

Depuis 10 ans, le 1er juin des écritures théâtrales jeunesse allume sur tout le territoire national les lumières de ce théâtre. Nombre d’auteurs et d’autrices seront présent·es pour lire leurs textes, les partager avec leurs jeunes spectateur·rices et parfois le découvrir mis en scène par leurs lecteur·rices, chorégraphié, choralisé, enregistré dans le cadre scolaire, dans un théâtre ou en famille…
Depuis que le théâtre jeunesse a délaissé les traditionnels contes merveilleux, les adaptations des romans d’aventure du 19e siècle, les créations collectives des années 70/80 mettant en scène le monde du cirque, de la musique, de la poésie, l’écriture jeunesse s’est emparée de tous les phénomènes sociaux, qui fracassent la société et le lien social. Ainsi du divorce, du harcèlement, des guerres, des migrations, de la solastalgie.

A six mois d’intervalle, l’université d’Artois et l’université de Bordeaux s’interrogent, l’une sur la violence dans le théâtre jeunesse contemporain, l’autre sur le théâtre jeunesse face à l’anxiété du monde. Comment répondre au pessimisme, à la mélancolie, aux troubles psychiques de la jeunesse d’un monde désuni par le théâtre ? Les auteurs et les autrices ont toujours à cœur de ne pas désespérer l’enfance, ni l’adolescence. Leurs exigences, leur
éthique ne cèdent jamais, car si le théâtre jeunesse conserve toujours une visée pédagogique émancipatrice, il est traversé également par toute une esthétique et une éthique de la sollicitude. De quoi s’agit-il en matière de fiction ? De proposer aux spectateur·rices les outils de la catharsis, de la métaphore, du déplacement, de l’adresse et d’inventer les passages vers une espérance, une propédeutique, un nouveau merveilleux sans infantilisme, ni mièvrerie ou niaiserie.

Les dramaturges jeunesse ont à cœur de réparer le monde, de le recoudre avec les fils de la fiction et de cautériser les blessures grâce à leur parole poétique ou imaginaire.

Le premier juin, rejoignez-les tous et toutes où que vous soyez et avec eux, rallumez les étoiles !

 

5 juin 2025
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