Message d’Yvette Hardie pour la Journée Mondiale du Théâtre

4 mars 2017
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Les enfants ne peuvent pas se rendre tous seuls au théâtre. La Journée mondiale du théâtre pour les enfants et les jeunes, célébrée tous les 20 mars, est un appel à reconnaître la dépendance des enfants envers les adultes qui les entourent, si nous voulons qu’ils vivent une rencontre avec arts en général, et le théâtre vivant en particulier. Pour cette raison, nous disons «Emmenez un enfant au théâtre aujourd’hui».
Le théâtre se passe dans un temps et un espace spécifique, et est, par sa nature-même, un moment fugace et particulier. Il parle des relations invisibles créées sur le moment, qui déverrouillent le cœur humain, et plantent des graines d’empathie et de curiosité, des envies de découverte qui peuvent avoir un impact sur le développement de l’être humain tout entier et sur son cheminement futur dans la vie.
Mais la connexion avec le théâtre, l’appréciation du théâtre, peuvent nécessiter des efforts de la part du public concerné. Ce n’est pas une fonction passive. C’est une activité qui exige de l’attention, de l’engagement, de l’ouverture, de la curiosité et une pensée critique. Elle exige un engagement total – pas seulement de l’engagement intellectuel, mais aussi physique, émotionnel et, certains le diront, spirituel. Lors de cet engagement complet, de multiples sens sont stimulés simultanément, et l’expérience est riche, puissante et transformatrice.
Beaucoup de parents comprennent la valeur de la lecture – qu’ils soient ou non des lecteurs eux-mêmes. Ils comprennent sa valeur fonctionnelle et reconnaissent sa capacité à être un passeport pour le monde réel, dans des domaines nouveaux pour les enfants et les jeunes. Ils comprennent que la lecture n’est pas quelque chose qu’on abandonne, même si les étapes initiales peuvent être exigeantes et frustrantes. Il y voient plutôt une clef qui peut déverrouiller des mondes entiers pour les jeunes, et qu’une pensée rencontrée dans un livre peut se traduire par une orientation pour la vie… Ils sont désireux de chercher le livre qui capturera suffisamment l’imagination de l’enfant pour lui faire franchir l’obstacle de l’apprentissage de la lecture. Pourquoi cette même reconnaissance n’est-elle pas accordée à l’expérience de la culture théâtrale ?
Le théâtre n’est pas quelque chose à abandonner après une mauvaise expérience. Ce n’est pas quelque chose qui rentre dans un moule. Cela peut être difficile et frustrant, ou agréable et engageant. Cela peut demander du temps au spectateur de théâtre pour apprécier pleinement les niveaux multiples de signes, les sentiments et les significations qui sont présentés. Mais, en tant qu’expérience distillée, il permet au public de «vraiment» voir ce qui est là, avec de nouveaux yeux, de voir l’objet, la personne, la relation, les signes d’une nouvelle façon, et de découvrir et d’interpréter leur signification pour eux-mêmes.
Le théâtre est une expérience unique de création de sens personnel pour les enfants, ce qui nécessite un engagement, et la qualité de cet engagement s’améliorera avec le temps, alors que les enfants et les jeunes deviennent plus réceptifs à l’expérience de voir une pièce de théâtre.
L’idée de culture théâtrale n’est pas une chimère – c’est une fenêtre importante et universelle dans la lecture et la compréhension du monde. Et ces compétences sont, oh combien, capitales, dans un monde qui semble de plus en plus hostile aux enfants, et où tant d’entre eux sont privés de pouvoir et négligés à cause de la pauvreté, de la guerre, des conflits et des déplacements. Ces enfants doivent devenir notre responsabilité collective.
Le défi pour les artistes et les activistes artistiques est de faire en sorte que tous les adultes qui ont le pouvoir d’enmener un enfant au théâtre (#Takeachildtothetheatretoday) comprennent aujourd’hui leurs responsabilités envers l’enfant qui ne rencontrera peut-être jamais le spectacle vivant sans leur intervention, et de travailler aussi dur dans ce domaine que nous le faisons pour permettre de lire et d’écrire.

Yvette Hardie

Presidente de l’ASSITEJ